Pauvre juge

Devant la commission d’enquête d’Outreau, étrange sentiment de malaise.

Un petit juge de 32 ans, physiquement écrasé à l’écran par des avocats, présents à ses côtés, qui paraissent "costauds" à son côté ;
un petit juge face à ses erreurs, tragiques, et luttant pour ne rien dire qui pourrait, par la suite, le remettre en cause dans une future commission discicplinaire ; un petit juge qui n’apparaît pas à la hauteur de sa charge.

Quelques députés cherchant visiblement à comprendre les mécanismes psychologiques d’un jeune juge d’instruction, sans expérience, ni juridique ni humaine.

Et d’autres députés, au spectacle, discourant à force de gestes, d’effets de manche, garantissant ne pas faire son procès, mais pourtant méprisants, hautains, assénant leurs "évidences" acquises à la lecture d’un dossier, sept ans après la fin du dossier.

A voir l’attitude, les insinuations de collusion avec le procureur de la république et les déclarations fracassantes ("il était pourtant facile de s’en apercevoir", "c’est un élément supplémentaire qui pourrait vous faire poser des questions, non ?", "c’est tout ce que vous avez à répondre à ce sujet ? Pourquoi il n’y a pas eu de non lieu tout de suite ? Enfin, quand même !!", "c’est tellement le bon sens !", "enfin quand même, c’est notre liberté qui est en cause, nous sommes la représentation nationale !", "est-ce que la part des choses n’a pas été faite que dans un seul sens ? c’est la question qu’on peut se poser, quand même", "bien -soupir- j’en ai terminé -soupir-") des députés Houillon et Desprez notamment, je ne suis pas sûr que cette commission en resorte grandie, ni crédible.

Paradoxalement, alors que j’étais (et reste, à l’écouter) persuadé que ce juge est pétri de certitudes, à la limite psychorigide (ou du moins l’était, avant cette tragédie), sans humilité, sans maturité, je suis plutôt à le plaindre ce soir, et à l’admirer pour son sang-froid face à ces accusions moralisatrices, démagogiques, et indignes de la fonction d’homme politique prétendûement objectif.

Malaise, malaise, face à ce procès qui ne veut pas dire son nom.