“J’étais invité comme tous leurs banquiers à leur assemblée générale. A un moment, il y a eu un grand chahut, une délégation d’une petite entreprise, sous-traitante de cette multinationale, qui venaient perturber l’AG. Ils ont tous perdu leur boulot, la multinationale a décidé, du jour au lendemain, de changer de fournisseur. La boite a fermé.
Le PDG a été correct, il leur a donné 5 minutes pour parler, à la tribune. Tout le temps qu’ils ont parlé, ils se sont fait sifflé par l’assistance, principalement des petits porteurs.
Tu te rends compte, Machin, des gens qui viennent de perdre leur boulot, qui se retrouvent à la rue, il se font siffler par toute la salle ?
Mais le pire, c’est que quelques mois plus tard, le PDG de la boite, il a des connexions à l’Elysée, il a appris que la loi sur les stock-options allait être modifiée. En 24h, il a monté un système pour délocaliser tout ce qu’il avait. Tout ce qu’il y a plus de légal, tu penses bien qu’aucune banque n’aurait osé le suivre sinon. Mais il a réalisé ses stock-options et tout mis à l’étranger.
On marche sur la tête … comment le même type peut faire ça tranquillement, alors que quelques semaines plus tôt, il venait de mettre sur le carreau une centaine de personnes ? On est devenus fous”
Comme une claque en écho, Le Monde publie aujourd’hui une interview du Prix Nobel de la Paix 2006, Muhammad Yunus, le fondateur du micro-crédit au Bangladesh :
Depuis vingt-cinq ans, la Grameen Bank et les institutions du microcrédit ont distribué 6 milliards de dollars à 150 millions de familles. […] 64 % de ceux qui nous ont emprunté pendant cinq ans sont sortis de la pauvreté chronique
La seule voix qui se fait entendre sur le marché est la maximisation des profits. […] Le système est aveugle à toute autre considération que le profit.
Quand nous étions des chasseurs-cueilleurs, nous n’étions pas des esclaves, nous dirigions nos existences. Des millions d’années plus tard, nous avons perdu cette liberté. Nous menons des vies rigides, calées sur les mêmes rythmes de travail tous les jours. Nous courons pour nous rendre au travail, nous courons pour rentrer à la maison. Cette vie robotique ne me semble pas un progrès. […] J’ai un salaire, un patron, je dois faire mon job que cela me plaise ou non, car je suis une machine à sous. […] L’homme est considéré comme un seul agent économique, un employé, un salarié, une machine. C’est une vision unidimensionnelle de l’humain.
Le problème central du capitalisme " unidimensionnel " est qu’il ne laisse place qu’à une seule manière de faire : rentrer des profits immédiats. Pourquoi n’intègre-t-on pas la dimension sociale dans la théorie économique ? Pourquoi ne pas construire des entreprises ayant pour objectif de payer décemment leurs salariés et d’améliorer la situation sociale plutôt que chercher à ce que dirigeants et actionnaires réalisent des bénéfices ?
Au delà de petits extraits, à lire en urgence :
25.04.08 |